Crise politique

CRISE AU MALI : L'URGENCE SÉCURITAIRE ET LE BLOCUS DJIHADISTE APPELANT À UNE ACTION INTERNATIONALE

CRISE AU MALI : L'URGENCE SÉCURITAIRE ET LE BLOCUS DJIHADISTE APPELANT À UNE ACTION INTERNATIONALE

À Bamako, — La crise sécuritaire au Mali a atteint un point de rupture, provoquant une onde de choc au niveau régional et international. La situation, marquée par une dégradation rapide de la sécurité et un blocus économique imposé par des groupes djihadistes, a récemment poussé la Commission de l’Union africaine (UA) à lancer un appel retentissant pour une « action internationale urgente ».

L'Appel à l'Urgence de l'Union Africaine

Le président de la Commission de l’UA, Mahamoud Ali Youssouf, a exprimé sa « profonde préoccupation » face à la détérioration au Mali. Dans un communiqué du 9 novembre 2025, l'UA a souligné que des groupes terroristes ont imposé un blocus, interrompant l'accès aux biens essentiels et aggravant de manière dramatique la crise humanitaire pour les populations civiles. Face à cette stratégie d'asphyxie, l'organisation africaine a exhorté à une « réponse internationale forte, coordonnée et cohérente pour lutter contre le terrorisme et l’extrémisme violent au Sahel. »

La Stratégie d'Asphyxie du JNIM

Au cœur de cette escalade se trouve le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM, également connu sous l’acronyme arabe JNIM), affilié à Al-Qaida. Depuis plusieurs semaines, le JNIM a mis en place une stratégie d'asphyxie économique redoutable, ciblant notamment les convois de ravitaillement.

Cette tactique a conduit à un blocus de facto sur plusieurs régions, y compris la capitale, Bamako, qui souffre d’une grave pénurie de carburant depuis septembre 2025. Les principaux axes routiers et commerciaux, notamment ceux reliant le Sénégal et la Mauritanie, sont contrôlés et bloqués. Ce blocus, qui étrangle l'économie du pays enclavé, est perçu par certains analystes comme un moyen pour le JNIM de punir la supposée collaboration des populations avec les forces armées maliennes (FAMa), mais aussi d'exercer une pression maximale sur la junte militaire au pouvoir.

Les objectifs exacts du JNIM sont débattus, mais leur emprise croissante sur les axes stratégiques et les zones rurales du centre vers le sud du Mali traduit une ambition d'étendre leur influence bien au-delà du mouvement insurrectionnel initial, cherchant potentiellement à accéder à une parcelle du pouvoir.

Une Crise Sécuritaire et Humanitaire Endémique

La situation actuelle est l’apogée d’une crise sécuritaire qui mine le Mali depuis le coup d'État de 2012 et l’insurrection dans le Nord. Malgré l'intervention française (Opération Serval, puis Barkhane) et la présence de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) jusqu'à son retrait récent, la violence djihadiste (GSIM et État islamique dans le Grand Sahara - EIGS) n'a cessé de s'étendre, se mêlant souvent aux conflits intercommunautaires.

L'impact humanitaire est dramatique :

  • Le blocus actuel aggrave la crise humanitaire en limitant l'accès aux biens essentiels et aux services de base.
  • L'insécurité alimentaire est un fléau qui touche des millions de personnes. En 2022 déjà, plus de 1,8 million de personnes étaient confrontées à une grave insécurité alimentaire, un chiffre en constante augmentation.
  • Les déplacements par voie terrestre sont formellement déconseillés, les groupes terroristes ciblant les routes nationales.

Conséquences Internationales et Réaction

Face à l'instabilité grandissante, plusieurs nations occidentales ont réagi. La France a récemment recommandé à ses ressortissants de quitter temporairement le Mali « dès que possible », citant la dégradation du contexte sécuritaire. Les États-Unis et le Royaume-Uni avaient déjà procédé à l'évacuation de leur personnel non essentiel.

De son côté, le gouvernement de transition, dirigé par le colonel Assimi Goïta, a affiché sa volonté de reprendre en main la sécurité du pays par ses propres moyens, notamment après la fin des opérations françaises et le retrait de la MINUSMA. Le gouvernement s'appuie sur le renforcement des Forces armées maliennes (FAMa), avec le soutien de forces russes (officiellement des instructeurs). Cependant, malgré les opérations appuyées par ces forces, les FAMa peinent à dégager durablement les axes stratégiques. Chaque reprise d'initiative est souvent suivie d'un repli, laissant les corridors commerciaux sous le contrôle des katibas djihadistes.

L'enlisement dans cette double crise, politique et sécuritaire, nourrit la crainte d'un effondrement institutionnel ou d'une partition de facto du territoire, ce qui menacerait non seulement la stabilité malienne, mais également celle des États côtiers du golfe de Guinée et de l'Alliance des États du Sahel (AES) que le Mali a formé avec le Niger et le Burkina Faso.

La situation actuelle place donc la communauté internationale devant un dilemme : comment répondre efficacement à l'urgence sécuritaire et humanitaire sans ingérence, tout en soutenant le peuple malien face à un terrorisme qui dicte désormais ses règles sur les routes du pays.


Grâce EBAKISSE,publié le 10 novembre 2025

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