Economie
La COBAC retire l'agrément à 70 institutions en 2024

La Commission Bancaire de l'Afrique Centrale (COBAC) a frappé un grand coup dans le secteur de la microfinance, provoquant une onde de choc sur le marché financier régional. L'autorité de régulation vient en effet de procéder au retrait de l'agrément de 70 Établissements de Microfinance (EMF) au sein de la Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) au cours de l'année 2024. Cette vague de sanctions sans précédent témoigne d'une volonté farouche d'assainir un secteur vital mais miné par des dérives, soulevant des questions majeures sur l'inclusion financière et la stabilité du système monétaire régional.
Une purge nécessaire pour la stabilité financière
Le chiffre de 70 retraits d'agrément est éloquent et marque l'ampleur du désordre qui régnait dans une partie du secteur. La LCOBAC justifie cette décision radicale par le non-respect persistant des ratios prudentiels fondamentaux, une gouvernance défaillante, des cas avérés de détournement de fonds et, surtout, la mise en péril de l'épargne publique. Pour le régulateur, ces institutions ne présentaient plus les garanties minimales de solidité financière et de probité requises pour exercer.
Dans un contexte économique régional déjà fragile, la multiplication des faillites d'EMF non régulées ou mal gérées représente un risque systémique majeur. Ces défaillances minent la confiance des épargnants et la crédibilité de l'architecture financière de la CEMAC. L'action de la COBAC est donc avant tout une mesure de protection du consommateur financier et une démarche proactive pour réduire le risque de contagion au reste du système bancaire. Il s'agit d'une affirmation de l'autorité du gendarme financier visant à imposer une discipline de marché plus stricte. L'objectif est clair : seuls les acteurs les plus solides et les plus transparents pourront continuer à opérer dans la zone.
L'impact sur l'inclusion et l'économie réelle
Si la mesure est louée par les observateurs pour son courage et sa nécessité, elle soulève néanmoins des inquiétudes quant à ses répercussions sociales et économiques immédiates. Le secteur de la microfinance est le pivot de l'inclusion financière en Afrique Centrale, offrant des services de crédit et d'épargne aux populations souvent exclues des réseaux bancaires classiques : petits commerçants, agriculteurs, PME informelles et ménages modestes.
La disparition de 70 acteurs, même défaillants, crée un vide opérationnel qui pourrait momentanément exacerber l'exclusion financière. Des milliers de bénéficiaires se retrouvent désormais sans accès facile au microcrédit, impactant directement leur capacité à développer leurs activités et, par extension, l'économie réelle des États membres.
Le défi pour les EMF restantes, désormais plus solides, sera d'absorber une partie de cette clientèle orpheline tout en maintenant des standards de prudence élevés. La COBAC et les gouvernements nationaux devront veiller à ce que l'assainissement du marché ne se traduise pas par un recul de l'accès aux services financiers de base pour les populations les plus vulnérables.
Défis de la liquidation et perspectives d'avenir
Le travail de la COBAC ne s'arrête pas au retrait d'agrément. Il faudra désormais gérer la phase délicate de la liquidation ordonnée de ces 70 structures. Ce processus, souvent long et complexe, nécessite de sécuriser les actifs et de déterminer les modalités de remboursement des déposants. La mise en place de mécanismes de garantie des dépôts plus robustes et plus rapides apparaît comme une urgence pour rassurer définitivement le public.
Cette décision de la COBAC est un signal fort : l'ère de la complaisance et de la gestion opaque dans la microfinance en CEMAC est révolue. C'est le prix à payer pour construire un secteur financier résilient et digne de confiance. Les acteurs qui survivent sont appelés à une consolidation et une professionnalisation accélérées, sous l'œil vigilant d'un régulateur qui a clairement démontré sa détermination à appliquer la loi avec rigueur. L'équilibre entre la stabilité financière du système régional et la poursuite de l'inclusion des populations restera le défi central pour les années à venir.
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